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Raxasukayu loxo

Choisir l’essentiel : une réponse low-tech à la crise sanitaire

par Triphène Tamba et Maria Moreira

Dans le cadre de la 12e édition de la Biennale Internationale Design Saint-ÉtienneFranck Houndégla, designer et scénographe, est le commissaire de l’exposition Singulier Plurielles centrée sur le design des villes et campagnes africaines. Pour mettre en lumière les réponses aux problématiques liées à la santé, il a choisi d'exposer le lave-main créé au centre de design dakarois Kër Thiossane.


Chapitre 1 : Dakar

Prenant un tour inattendu du fait de la pandémie et au lieu de faire venir l’objet depuis le Sénégal, la Cité du design et l'École supérieure d'art et design de Saint-Étienne (Esadse) ont décidé de faire venir à Saint-Étienne… « de la matière grise » : Bassirou Wade, designer dakarois et Yann-Philippe Tastevin, anthropologue français, chercheur au CNRS. Le but : travailler avec les jeunes designers à l'Esadse et refaire ensemble le chemin de la production du lave-main. 

Premières explorations du Workshop © Triphène Tamba

Chapitre 2 : Premières explorations du workshop

Voici en images les premiers jours du workshop Raxasukayu loxo (Lave-main en wolof1). 

Bassirou Wade (ou Bass, comme tout le monde appelle à Dakar), est à Saint-Étienne depuis une semaine. Quand on organise un workshop international dans les temps de la crise sanitaire, cette quarantaine de 7 jours s'imposait.

En binôme avec Yann-Philippe Tastevin, chercheur au Laboratoire interdisciplinaire solidarités, sociétés, territoires (LISST - CNRS, Université Toulouse - Jean Jaurès, EHESS) et initiateur du projet du lave-main à Dakar, ils présentent le contexte du projet, ses réussites et ses défis. Le but : définir avec les étudiants le cahier des charges pour les semaines à venir. Il ne s'agit pas, en effet, de reproduire l'objet dakarois, mais de refaire le chemin depuis le début, profitant de l'expérience et des savoir-faire des intervenants.   

Bass n'arrive pas à Saint-Étienne les mains vides. De Dakar, il apporte des pièces de son atelier, des composants du futur objet. Cette question de matières à utiliser devient très vite un des sujets centraux dans le workshop. Les étudiants se lancent dans un pari fou de trouver le maximum de composants pour la production de l'objet dans un rayon de 50 km de Saint-Étienne. Récupérés, chinés, achetés dans les magasins locaux, les composants sont petit à petit assemblés sur le territoire stéphanois. 

Futures composantes du Lave-main © Triphène Tamba

Chapitre 3 : Inventer le mécanisme

Le temps est court et les défis sont nombreux pour l'équipe du workshop. Il s'agit d'inventer un mécanisme viable à prix modeste, l'une des caractéristiques de la low tech. 
Comment rendre l'utilisation simple ? Comment contrôler le niveau d'eau et du savon ? Comment s'assurer que l'eau ne fuit pas ? Comment rendre la vidange facile ?  Voici quelques-unes des questions que se sont posées les designers. 

Inventer le mécanisme © Triphène Tamba

Le low tech à l’inverse, défini tantôt négativement (pauvreté des moyens, économie des modes de composition) tantôt positivement (économique, efficace, durable, participatif), viendrait partout ébranler la toute-puissance du high tech. Avec lui, ce ne sont pas seulement une autre lecture des techniques, d’autres modes d’assemblage qui se donnent à voir, mais des populations entières d’hommes et de procédés, dont le rôle a bien souvent été sous-estimé.

Quand le low tech rencontre la céramique ©Triphène Tamba

Une fois de plus, le lave-main réuni les savoir-faire et sert de lieu de rendez-vous. A côté du workshop Raxasukayu Loxo se déroule le workshop concernant la céramique animé par Céline Janczak, artiste plasticienne designer-céramiste française. Des conversations, échanges et observations naît l'idée d'utiliser la céramique pour la production des vasques. Ce matériau est d'ailleurs un clin d'œil à CanaCla, l'objet qui a inspiré la technologie du lave-main et qui était réalisé en terre cuite.

L’eau est un bien précieux : loin d’un rêve utopiste, des solutions existent.

Touchée par ce chercheur passionné [Bassirou Wade], c’était comme une évidence d’apporter une touche de Terracotta à ce projet Low [tech] design. C’est aussi une mise en valeur de l’argile, ce matériau naturel et durable. 

Céline Janczak, artiste céramiste
Travail sur les vasques, pôle modélisation de l’Esadse © Triphène Tamba

Chapitre 4 : Le lave-main prêt pour La cabane du design

Suite au report de la Biennale Internationale Design Saint-Étienne, l’équipe décide de mettre le lave-main à l’épreuve du public le plus exigent – les enfants. C'est décidé : le lave-main sera installé devant la Cabane du design, le tout nouvel espace pour les jeunes publics ouvert à la Cité du design en juin 2021.

Triphène et Simon autour de l’objet fini  © Sandrine Binoux

Postface : Triphène Tamba, autrice du « journal de workshop »

Triphène Tamba © Manyane Kpatoumbi Kankpe

Triphène Tamba est volontaire en service civique au sein de la Cité du design-Esadse dans le cadre de la Saison Africa 2020 (janvier-octobre 2021). Étudiante en économie du développement au sein de l’université Marien Ngouabi, elle est en parallèle artiste comédienne, membre de la fabrique culturelle Gare aux pieds au Congo Brazzaville.

Hyperactive, passionnée de l’art, elle a participé à de nombreux projets culturels au Congo, notamment, le Festival Mantsina sur scène, une des plus importantes plateformes théâtrales de l’Afrique. Dans son travail de jeu et d'écriture, elle explore les thématiques liées à la situation féminine. En tant qu'artiste, elle souhaite briser les tabous, libérer la parole et trouver le courage d’affronter les traumatismes liés au sexe et aux violences faites aux femmes au Congo et ailleurs.

En 2020, l’exposition Singulier Plurielles sous commissariat de Franck Houndégla prévue lors de la 12e Biennale Internationale Design Saint-Étienneainsi que ses événements satellites, ont été labellisés Africa 2020. Dans ce cadre, Triphène a rejoint l’équipe des relations internationales de la Cité du design pour aider au montage des projets et apporter son regard extérieur. Elle a notamment suivi et documenté les expérimentations et les workshops organisés autour de l’exposition Singulier Plurielles en février-juin 2021.

Inspirée par les projets auxquels elle a participé pendant sa mission en France et grâce au recul qu’elle a pris par rapport à ses activités au Congo, Triphène a imaginé le projet Educulture qu’elle prévoit de mettre en place après son retour au Congo. Le projet visera à sensibiliser les jeunes congolais et congolaises à la notion de vivre ensemble grâce à la formation artistique, et à travailler ainsi sur le problème de délinquance juvénile au Congo. 


Workshop animé par Bassirou Wade et Yann-Philippe Tastevin, encadré par Elen Gavillet, enseignante en design phase projet (master), accompagné par les Jean-Philippe Julien, Bertrand Mathevet et Vincent Rivory au sein des ateliers techniques Esadse.

Avec les étudiants de l’Esadse : Pauline Bernichan (année 3 Design objet-graphisme) ; Leila Bouyssou (année 3 Design objet-graphisme) ; Ekaterina Brytkova (année 5 Design Objet) ; Anna Diop-Dubois (année 5 Média) ; Simon Frajer (année 4 Design Objet) ; Juliette Laroche (année 4 Design Objet) ; Augustin Meunier (année 3 Design objet-graphisme) ; Laura Millaud (année 3 Design objet-graphisme) ; Matteo Sanchez (année 4 Design Objet) ; Léa Thomas (année 4 Design Objet) ; Claire Vauquois (année 4 Design Objet).

Observation/assistance/photos : Triphène Tamba, volontaire Africa 2020 en service civique à la Cité du design & étudiante licence économie du développement université Marien Ngouabi – Congo Brazzaville.


Ce projet a été mis en place grâce au soutien de l’Institut Français du Sénégal et de la Région Auvergne-Rhône-Alpes.

par Triphène Tamba et Maria Moreira


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