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Designer en collectif

Choisir l’essentiel : un atelier réunit 2 écoles de Design au Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole

par Coline Vernay

Escale au Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métrople (Mamc+) pour « choisir l’essentiel » dans l’exposition en cours Déjà-vu.

Le Workshop avec les étudiants confinés

« Les workshops ont été un défi vraiment difficile à relever. Confinés, nous n’avions pas les mêmes possibilités. Nous avons pu faire des points réguliers, et une semaine de workshop complètement en visio, pendant laquelle nous étions connectés quasi sans interruption, depuis la Norvège, l’Italie et Toulouse. C’était intéressant et cela a marché assez bien quand même, même si c’était triste d'être loin et de ne pas avoir le même contact. Avec Philippe Rekacewicz et Nathalie Bruyère on a pu transmettre ce qu’on a voulu, et les résultats étaient quand même satisfaisants au final », raconte Imke Plinta, commissaire de l’exposition.

Open window

Dans l’espace dédié à la présentation de ce workshop, situé à la fin de l’exposition, on retrouve la précédente question de l’ouverture, à travers deux projets de fenêtres. « Le sujet de réflexion était : comment interprète-t-on son espace minimum en connexion avec l'extérieur, quelle est la connexion avec l’extérieur quand on est confinés ? On a laissé imaginer aux étudiants ce que pouvait être un lien avec l'extérieur, possible à faire chez soi, et ainsi sont nés les prototypes de la fenêtre hamac et la fenêtre potager. Elles sont liées avec un tutoriel, pour programmer avec des outils numériques sa propre fenêtre, adaptée à son chez-soi. L’idée, liée à l’association Ultra Ordinaire dont fait partie Nathalie Bruyère, designer et professeur à l'IsdaT, est de partager les projets pour que d’autres s’en emparent, les démocratiser et rendre accessibles pour tout le monde, tout en permettant de prendre en compte les contraintes de chacun, comme les différents formats de fenêtres… », présente la commissaire. Elle poursuit : « Ce que je trouve très intéressant là-dedans, qui me satisfait vraiment dans la collaboration avec Nathalie et les étudiants de l'IsdaT et l'Esadse, c’est que la variété des profils et des expériences professionnelles a permis de faire voir comment le design se transforme, et peut aussi être un outil pour autre chose que la réalisation de produits finis. Le design peut aussi consister à réaliser quelque chose qui peut devenir un outil pour créer d’autres pièces, ou autre chose. »

Subversives Archives

De ce travail collectif ressortent des façons d’explorer les marges, et de développer des pratiques alternatives au capitalisme industriel. Olivier Peyricot, directeur de la recherche Cité du design et directeur scientifique de la Biennale Internationale Design, explique : « Les étudiants ont travaillé à partir d’une archive issue de la Global Tools. Ce mouvement radical italien des années 70 était une première critique, avec pour objectif de proposer des outils permettant à tous de regagner de l’autonomie. » Ces activistes étaient notamment écologistes et cherchaient à développer une pédagogie critique ainsi qu’une architecture radicale.

Pour en savoir plus sur la Global Tools, une présentation est accessible ici en ligne, et un ouvrage de Nathalie Bruyère et Victor Petit va bientôt paraître sur le sujet : Global Tools, 1973-1975 - Design, projets & pré-écologie, aux Editions ISDAT, parution prévue en 2021.

« C’était une étape indispensable mais qui a été reprise par le système capitaliste, et qui demande aujourd’hui à être dépassée », continue Olivier. « La Global Tools donne des outils qui sont pensés par des designers, des outils très en-deçà de ce qu’on a pu voir dans la salle à côté comme appareils électroménagers, car ils ne sont pas industrialisés : ce sont des techniques, des modes opératoires, etc. Après, l’autonomie a toujours son contre pied, parce que c’est ce que veut le néo-libéralisme, des individus autonomes, qui gèrent eux-mêmes les services, etc. Les intuitions des avant-gardes sont souvent transcendées dans des choses qui aliènent plus que libèrent. Aujourd’hui, on est critique de l’autonomie, pour moi il s’agit de dire qu’il faut plutôt qu’on construise nos dépendances, qu’on regarde comment on est relié à plein de choses : la nature, les animaux, le collectif, les individus… Ce qui permet un rapport plus politique et social aux environnements. Reprendre 50 ans après les archives de la Global Tools permet d’avancer un cran sur les potentialités du design. Les étudiants font ici des contre-discours sur l’autonomie, recherchent des formes de liens », s’enthousiasme le directeur de la recherche à la Cité du Design.

Le design dans notre quotidien... de demain ?

Exemples d'objets imprimés en 3D lors du workshop

Ce laboratoire choisit d’ouvrir les perspectives, comme conclusion à l’exposition, tout en y faisant référence. Le journal de l’expo présente le projet en ces termes : « Les étudiants se saisissent des objets et de l’exposition (...) par tout un jeu de reprise et d’augmentations ». En effet, dans l’espace dédié au workshop, au milieu des traces laissées par la recherche active, des objets achevés sont également présentés. Leurs formes et les techniques utilisées pour leur fabrication sont assez inhabituelles pour interroger le regard des visiteurs. Ils sont pourtant directement en lien avec les différents appareils électroménagers présentés précédemment dans la « salle des ménagères ». « Imaginer que la forme suive le milieu naturel, culturel et technique, en permettant que les productions soient transformables, en répondant aux problèmes écologiques, en pensant une nouvelle organisation du travail. Ce projet souligne les impacts sur l’élaboration des objets en cuisine », présente le journal. C’est ainsi que l’exposition se conclut, sur des questionnements brûlants.


Ruedi Baur et Imke Plinta dialoguent autour de la capacité du design à générer des transformations sociétales positives, en lien avec l'exposition "Déjà-vu. Le design dans notre quotidien" et en réaction aux bouleversements vécus depuis une année. Comment le design peut-il... Proposer de nouveaux imaginaires ? Accompagner leurs réalisations ? Voire même contribuer à co-construire un futur désiré par des citoyens responsabilisés ? Bref, comment peut-il aider à réparer la démocratie tout en soignant Gaïa ?


L’exposition Déjà-vu. Le design dans notre quotidien est visible jusqu’au 22 août 2021 au Mamc+.
mamc.saint-etienne.fr

par Coline Vernay


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