DNSEP Design mention Média

Hugo Guyomard

Luthiopia

Avant tout, Luthiopia est à la fois fini, à la fois en cours.     

Aboutissement d’une réflexion qui puise dans un cursus ingénieur d’abord puis dans les cinq ans passés à l’ESADSE, l’enjeu était de convoquer ici différentes disciplines déjà expérimentées afin de les unir. Ce projet témoigne en cela d’une affection particulière pour les mathématiques, la musique ainsi que la lutherie.  
Luthiopia est une pièce pour ensemble non-exhaustif mais sensible. Il est entendu par là qu’elle puisse exister dans d’autres combinaisons que celle proposée, avec des instruments supplémentaires (ou en moins), et pour l’instant un opérateur humain, que nous qualifierons « d’explorateur ».

En effet, il s’agit d’une installation, d’une performance, mais surtout de la genèse d’une famille d’instruments à venir. Le mot instrument est sélectionné ici pour son étymologie estrument, qui par évolution historique revient à une « personne ou chose qui sert à parvenir à quelque fin ». Évidemment, le distinguo entre instrument de musique et/ou de mesure n’est pas fait ni à faire.    

Dans le cadre du DNSEP, les trois premiers-nés de Luthiopia ont pris place dans une scénographie proche d’un live musical : semi-obscurité, projecteurs tamisés. 

Cycloptic, l’aîné, récupère la lumière traversant son disque en rotation (interchangeable) pour synthétiser trois notes choisies arbitrairement, mais génère également trois effets audio (delay, reverb et pan) renvoyés vers lui-même (il est donc sa propre pédale d’effet). Les disques renvoient également à l’idée de partition, dont on essaiera de s’extraire via une liberté graphique dans leur dessin.   

Wavalance, le cadet, reçoit un accord de l’explorateur (première interaction) qui contrôle sa vitesse de balancement. Cette dernière entraînera le tambour océan à son sommet pour créer une texture sonore (non amplifiée) rappelant celle des vagues maritimes. En outre, l’amplitude de l’angle créé agit sur les hautes fréquences de Cycloptic (deuxième interaction).    

Cellostep, le benjamin, fonctionne comme un simple séquenceur ; plusieurs modules de bois sont disposés sur le manche de façon à ce que le laser situé au-dessus capte les différentes hauteurs lors de ses aller-retours linéaires. Les sons renvoyés, choisis arbitrairement aussi, sont une base rythmique dans la composition proposée (percussions, kick, snare, etc.). Enfin, le son de Cellostep agit également comme un compresseur sur le master, soit sur l’ensemble du son créé numériquement (troisième interaction).    

L’explorateur, d’une part, fonctionne et agit comme un quatrième joueur dans le groupe. Il n’est ni au centre, ni dans l’ombre ou en régie, mais sur un pied d’égalité avec les trois instruments (symboliquement et littéralement dans la scénographie). Ici, le jeu se fait à la fois au clavier MIDI et à la basse électrique. D’autre part, il a une responsabilité didactique quant à la démonstration, dans le but d’aider autrui à comprendre, donc entendre, cet échange sonore vivant.     

Il y a volonté de questionner le positionnement de l’explorateur sonore (ou du musicien) dans cette composition interactive, ainsi que de guider ces instruments vers une semi-indépendance. Interactions spontanées qui peuvent échapper au contrôle, tendant parfois vers l’imprévu hasardeux, voilà une composante aussi humaine que récurrente lorsque l’on pratique la musique à plusieurs.     

Après tout, Luthiopia est à la fois en cours, à la fois un fini.

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© Fabrice Roure


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