Programme de recherche

Deep Design Lab

Explorations profondes des matérialités et des représentations visuelles de l’Anthropocène

Par Vincent Gobber

Deep Design Lab © Simone Fehlinger (composing with "The Blue Marble", 1972 © NASA)

Le Deep Design Lab (DDL) explore des artefacts qui organisent les relations entre l’Homme et la nature dans le cadre du concept de l’anthropocène – terme (provisoire) qui désigne l’activité humaine comme puissance géologique.

Projets de recherche et actions DDL

Suite à un travail de préfiguration (comme nous l’avons présenté dans le cadre de la conférence "The Anthropocene Grid" à l’EESAB en 2019), le Deep Design Lab part de deux postulats : 
– l’anthropocène est la conséquence de la division artificielle (et occidentale) de notre habitat en deux espaces : naturel et culturel ;
– ce même habitat a été construit par une élite européenne aux dépens des êtres humains déclassés et au détriment des êtres non-humains.

Le terme « anthropocène » décrit le fait que les activités humaines (comme l’agriculture, la colonisation, l'industrialisation, l'urbanisation, le capitalisme ou le consumérisme) ont profondément altéré les cycles biogéochimiques de la planète. L’être humain aurait ainsi créé une nouvelle strate géologique archivant le radio-isotope, le plastique, le béton ou le génocide. À travers des projets de recherche-design transdisciplinaires, le Deep Design Lab explore nos matérialités et nos représentations visuelles de l’anthropocène afin de questionner des pensées et des normes profondément ancrées dans nos images, nos objets, nos bâtiments et nos infrastructures.

Pour comprendre et pour s’émanciper de ces Master's Tools (« outils du maître ») comme les appelle la poétesse et militante étasunienne Audre Lorde, les projets du DDL s’intéressent aux objets et aux images qui conditionnent les rapports entre l'humain et son environnement. Ils étudient les réalités matérielles de nos outils (les « ressources » et les infrastructures humaines et non-humaines nécessaires à leurs créations) ; déconstruisent les fictions que ces outils génèrent (les idéologies socio-politiques, économiques ou écologiques matérialisées par les artefacts) ; questionnent les environnements qui transforment les fictions en attitudes dans nos réalités quotidiennes. 

Le terme « deep » renvoie ainsi à un design « profond » qui défie la vision moderne du design (et du monde). Cette vision se caractérise par un style ― une surface ― qui masque des réalités matérielles composées et simplifie des relations humains/humains, humains/non-humains ou non-humains/non-humains pourtant complexes et interdépendantes. DDL prend comme point de départ la bifurcation entreprise par les Européens au XVe siècle, lorsque le monde divin s’est transformé en « laboratoire » (Georges Bernanos), c'est-à-dire en objet d’étude et de contrôle. En questionnant la performativité du design et sa capacité à créer des valeurs sociales et politiques, les projets menés au sein du Deep Design Lab cherchent des artefacts qui génèrent des attitudes non-anthropocentriques.

Des artefacts en tant que systèmes (techniques) complexes

Nous ne vivons pas sans médiation avec nos environnements (naturels et artificiels). Nous rendons notre monde habitable à travers nos outils, nos images, nos objets, etc. qui fonctionnent en tant que systèmes complexes modélisant nos corps, nos paysages, nos comportements. Comment « re-designer » les médias (techniques) de notre quotidien pour modéliser des attitudes « non-anthropocènes » qui reposent sur des réalités interconnectées ? 

Inspiré par les méthodologies anthropologiques, le Deep Design Lab produit des contenus au travers de l’enquête et du travail de terrain, tout en développant ses propres méthodes et outils de recherche-design. Il cherche à mettre en forme cette enquête et partager cette recherche (en cours). À travers des projets qui adressent des questions de recherche-design concrètes, le Deep Design Lab se construit autour des axes thématiques « Bifurcations » et « Terre des villes » :

Bifurcations
Comment le design, par la création d'expérimentations et de scénarios, peut-il proposer un « méta-discours » pour guider la prise de décision politique ? De quelle manière le design peut-il accompagner et/ou provoquer des changements radicaux ?

Terre des villes
L’histoire de Saint-Étienne est étroitement liée à l'histoire de la colonisation des sols par l'Homme. Les mines en tant qu’artefacts de l'anthropocène sont le reflet des transformations environnementales provoquées par l'action humaine (extraction des ressources, déplacement de la terre, pollution des sols, etc.). Comment le design peut-il contribuer à rendre (à nouveau) habitable ces paysages altérées ? Comment instaurer un nouveau « contrat » de cohabitation entre humain et non-humain ?

Entre 2019 et 2022, en collaboration avec l’École urbaine de Lyon, le Deep Design Lab développe ses axes de recherches via trois projets de recherche-design, qui ont donné lieu à des expérimentations, des expositions, des évènements, des publications, des conférences et des rencontres, à savoir :

Maison Soustraire - Laboratoire d’un habitat en diminution par Mathilde Pellé (axe « Bifurcations »);
New Weather TV par Simone Fehlinger (axe « Bifurcations »);
Renouer - Mettre en usage une plante  « invasive » pour reconstruire le rapport d’une ville à sa terre par Jean-Sébastien Poncet (axe « Terre des villes »).

En 2022, le Deep Design Lab intègre le programme de l’École supérieure d’art et design Saint-Étienne afin de développer des formats pédagogiques initiant à la recherche. En questionnant des artefacts ― des objets, des images ou des protocoles ― qui semblent structurer les relations entre l’Homme et la nature, ce studio de recherche transversal propose de pousser l’idée du « deep design » à la fois comme méthode de recherche et mode d’enseignement dans le cadre du concept de l’anthropocène. Des séminaires, workshops, expérimentations, expositions, publications, etc. sont ses outils.


Le Deep Design Lab a été lancé en tant que collaboration entre la Cité du design-École supérieure d'art et design de Saint-Étienne et l'École urbaine de Lyon (2019―2022) à partir des valeurs et engagements communs aux deux entités : l’interdisciplinarité radicale, l’expérimentation comme pratique concrète de la recherche, la forme en tant que moyen de partage du savoir avec le plus grand nombre (experts et non-experts). En 2022, le Deep Design Lab intègre le programme pédagogique de l’École supérieure d’art et design Saint-Étienne, élargissant ces ambitions initiales en lien avec l’enseignement.

Équipe
2019-2022
Sous la direction d’Olivier Peyricot, directeur de la recherche à la Cité du design et Michel Lussault, directeur de l’École urbaine de Lyon.
– Simone Fehlinger : designer-chercheure, responsable du Deep Design Lab;
– Marine Fulchiron Lecointe : coordinatrice recherche Cité du design; 
– Bérénice Gagne : chargée de projets à l'École urbaine de Lyon (en charge de la veille, de la formation professionnelle et du territoire de Saint-Étienne);
– Jean-Sébastien Poncet, designer-chercheur associé;
– Mathilde Pellé, designer-chercheure associée;
– Delphine Hyvrier, doctorante Université Jean-Monnet/Cité du design.

2022
Enseignante : Simone Fehlinger, designer-chercheure, responsable du Deep Design Lab;
Doctorantes et étudiantes-chercheures associées : Delphine Hyvrier, doctorante UJM/Cité du design-Esadse; Charlotte Goffette, étudiante-chercheure en DSRD, CyDRe Esadse.

Contact : Simone Fehlinger (designer-chercheure, responsable du Deep Design Lab)
simone.fehlinger@esadse.fr


Ce travail a bénéficié d’une aide de l’État gérée par l’Agence Nationale de la Recherche au titre du programme d’investissements d’avenir portant la référence ANR 17-CONV-0004.

Par Vincent Gobber


Environmental Data, Media, and the HumanitiesSimone Fehlinger et Damien Baïs participent au Hackathon organisé par le Potsdam Network for Digital Humanities du 31 mai au 2 juin 2023

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29.04.2022 ⁄ 14:0017:30
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